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Du 21 au 23 mars 2005, le Ministère des Affaires Etrangères, agissant en coopération avec le Ministère de l’Agriculture, a organisé un séminaire sur le thème : « Comment atteindre la sécurité alimentaire : un défi majeur pour la cohérence des politiques ». Ce séminaire a eu lieu dans le cadre de la Présidence luxembourgeoise du Conseil de l’UE. Il a été préparé avec le concours d’un comité de pilotage animé en particulier par le European Center for Development Policy Management, le International Center for Trade and Sustainable Development et le Collectif Stratégies Alimentaires.
Le séminaire a été ouvert par les discours d’introduction prononcés par Monsieur Jean-Louis Schiltz, Ministre de la Coopération et de l’Action humanitaire, et Monsieur Fernand Boden, Ministre de l’Agriculture, de la Viticulture et du Développement rural.
Y ont pris part au total plus de 120 personnes (voir liste en annexe 1), dont des représentants des Ministères de l’Agriculture, du Commerce Extérieur et de la Coopération au Développement de 18 Etats membres de l’UE et de la Commission. Y ont participé aussi des représentants de plusieurs pays en développement, y compris l’Inde et l’Indonésie, d’organisations internationales et régionales, dont la FAO, la BERD, l’Union Africaine, la CEDEAO, l’UEMOA, le CTA et le Club du Sahel, des parlementaires, des centres de recherche, des ONG et des mouvements paysans du Nord et du Sud.
Le premier jour, des personnes ressources (voir liste en annexe 2) de haut niveau, de l’agriculture, du développement et du commerce extérieur, ont fait des présentations sur les défis de la sécurité alimentaire. Le deuxième et le troisième jour, des exposés ont successivement introduit les débats sur trois thèmes qui ont ensuite été approfondis dans des groupes de travail. Les résultats de ces discussions sont résumés ci-après.
Plus de 840 millions de personnes souffrent de sous-alimentation dans les pays en développement. L’objectif no 1 des Objectifs du Millénaire pour le Développement vise à réduire la proportion de la population souffrant de la faim de moitié entre 1990 et 2015. Si nous voulons assurer la sécurité alimentaire, il faudra trouver les moyens de couvrir les besoins alimentaires quantitatifs et qualitatifs de l’humanité à moyen et à long terme.
Le défi majeur pour la communauté internationale n’est pas seulement d’accroître la production agricole et alimentaire, mais aussi de faire en sorte que la production agricole produise suffisamment de revenus pour les plus démunis et qu’elle contribue à l’utilisation durable des ressources naturelles.
1. Le séminaire a permis de souligner avec force la pertinence du thème choisi : la sécurité alimentaire et la cohérence des politiques.
2. L’idée de réunir autour d’une même table les représentants de plusieurs Ministères concernés par la même problématique a été généralement saluée.
3. Le caractère durable et multifonctionnel de l’agriculture a été reconnu étant donné ses aspects à la fois économiques, sociaux et environnementaux. L’agriculture est caractérisée par ces spécificités qui la distinguent des autres secteurs économiques.
4. Les exploitations agricoles familiales méritent une attention particulière.
5. Assurer la sécurité alimentaire relève du respect de plusieurs droits fondamentaux de la personne humaine : égalité de tous les êtres humains en dignité, droit à la vie, droit à l’alimentation.
6. Le séminaire a permis
Avec 63% de la population mondiale et 73% des plus pauvres vivant dans les régions rurales, l’agriculture joue un rôle central dans les stratégies de réduction de la pauvreté. Même si au niveau mondial, la production vivrière continue d’accroître, le nombre de personnes qui ont faim n’a pas baissé.
Il a été recommandé que :
Il a été recommandé que les donateurs
Les prix mondiaux des principaux produits d’exportation agricoles - mais, blé, soya, coton et riz - ont chuté de plus de 40% depuis 1996. Un phénomène similaire s’observe en ce qui concerne les produits d’exportation qui occupent une place importante, surtout pour certains des Pays les Moins Avancés. Ainsi, en 20 ans, les prix du café, du cacao, du sucre et de l’huile de palme ont diminué de plus de 60%.
La pauvreté de la paysannerie des pays en développement s’explique dans une bonne partie par l’existence d’un système de formation de prix agricoles qui conduit à une baisse tendancielle de ces prix et par conséquent du revenu et du pouvoir d’achat de ces paysans.
Cette situation est d’autant plus grave que les gouvernements de ces pays ne sont pas en mesure de verser des aides à leur paysannerie.
Il a été noté que l’Afrique, étant déjà intégré dans les marchés internationaux, et à défaut de marchés locaux, nationaux et régionaux, est largement dépendante des marchés mondiaux et des prix mondiaux qui ne reflètent pas le coût de production mais plutôt celui des surplus.
Depuis les 20 dernières années, de nombreux instruments pour une intervention publique au niveau du commerce des produits de base agricoles, comme les Conseils de Commercialisation de l’Etat («state marketing boards »), ont disparus avec les programmes d’ajustement structurels.
Considérant que l’élimination des subventions selon l’accord sur l’agriculture en vigueur à l’OMC n’est pas de nature à conduire à une hausse des prix ni même à leur stabilisation, un rôle plus actif des Etats concernés est requis d’urgence, notamment au regard de la gestion de la capacité de production de surplus, par des mesures comme la mise en gel des terres, des systèmes de stockage ou des mécanismes de stabilisation des prix comme méthode la plus efficace pour maintenir le prix dans une fourchette qui soit acceptable aussi bien pour les producteurs que pour les consommateurs.
Des prix rémunérateurs et la stabilité des prix est une question cruciale car elle concerne directement le revenu des agriculteurs et donc aussi la sécurité alimentaire.
Des prix rémunérateurs sont indispensables pour permettre aux producteurs
Une telle politique de stabilisation des prix est de nature à contribuer à réduire les déficits alimentaires.
En conséquence, il a été recommandé que:
Depuis les 20 dernières années, la concentration des entreprises dans l’industrie agro-alimentaire a augmenté grâce à de nombreuses fusions et acquisitions. Ainsi, seulement 4 à 5 multinationales transforment 60 à 70 % de la production mondiale de café et de cacao. Globalement, pour chaque produit de base, ce sont 300 à 400 acheteurs qui prennent des décisions clé, et non les millions de consommateurs. Les paysans, de leur côté, n’ont pas le poids nécessaire pour négocier des prix profitables pour leurs produits.
Il a été recommandé que :
les pays industrialisés fassent respecter les lois de la concurrence à l’égard des entreprises ayant une position dominante sur le marché agroalimentaire
Dans les pays industrialisés, le prix à la ferme a peu d'incidence sur le prix au détail pour le consommateur final. Cela se vérifie aussi, mais dans une moindre mesure, dans les pays en développement. Cependant, augmenter les prix des aliments peut poser des difficultés politiques aux gouvernements des pays en voie de développement, car les populations urbaines en seront affectées négativement. Les gouvernements devraient donc mettre en place des mesures et des réseaux de sécurité qui mettraient les pauvres du milieu urbain à l’abri des prix agricoles croissants. D’un autre côté, si la population rurale n’obtient pas de prix rémunérateurs pour sa production, elle migrera (exode rural) pour aller rejoindre et gonfler la population urbaine pauvre.
Il a été recommandé que :
des mécanismes appropriés soient établis permettant d’assurer un pouvoir d’achat minimum aux consommateurs pauvres urbains
La réforme des politiques agricoles dans le cadre des négociations à l’OMC et aussi dans celui d’une série d’accords régionaux et bilatéraux, pourrait jouer un rôle dans l’accroissement de la sécurité alimentaire. Dans les 15 dernières années, le commerce agricole mondial a évolué presque 2 fois plus vite que la production.
Cependant les travaux du Doha Round devraient tenir compte des écarts rapidement croissants entre la productivité des agricultures du Nord et d’un nombre limité de pays en développement d’une part et la majorité des pays en développement de l’autre. Ce rapport de productivité qui a été de 1 à 10 au début du 20ième siècle est entre-temps de l’ordre de 1 à 1000 voire même plus.
Il a été recommandé que :
Il est recommandé que :
La nouvelle Constitution européenne* comprend une disposition qui prévoit la cohérence entre les différents domaines de l’action extérieure de l’UE, et entre ceux-ci et ses autres politiques. L’éradication de la pauvreté devient l’objectif principal de la politique de coopération de l’UE, qui tient compte des objectifs de la coopération au développement dans la mise en œuvre des politiques qui sont susceptibles d’affecter les pays en développement.
L’importance d’une volonté politique pour la mise en œuvre de la cohérence des politiques a été soulignée, vu aussi les intérêts contradictoires en jeu.
Il a été recommandé que:
la Commission européenne publie des rapports de suivi périodiques sur la cohérence des politiques et rend ainsi visible le coût de l’incohérence des politiques
Il a été reconnu que les négociations du Doha Round pourraient conduire à des progrès favorisant la mise en œuvre des stratégies de sécurité alimentaire. Cependant, les participants ont estimé que ces progrès ne sont pas appuyés par les politiques que la Banque Mondiale et le FMI ont introduites dans les pays en développement. Les participants ont demandé aux pays donateurs d’assumer leur responsabilité au sein de ces agences et de reconsidérer ces politiques envers les pays en développement qui affectent la sécurité alimentaire.
Il a été recommandé que:
l’OMC et les autres Institutions de Bretton Woods intensifient leur coopération dans le domaine commercial.
Il a été recommandé que :
Ces conclusions et recommandations sont diffusées aux participants. Elles sont également rendues disponibles sur le site Internet de la Présidence Luxembourgeoise. Elles seront enfin remises aux Ministres Fernand Boden, Ministre de l’Agriculture, de la Viticulture et du Développement Rural, Jean-Louis Schiltz, Ministre de la Coopération et de l’Action Humanitaire, et Nicolas Schmit, Ministre délégué aux Affaires Etrangères et à l’Immigration.
La Présidence se réserve de revenir à un stade ultérieur sur d’autres aspects du suivi de ce séminaire.
* Les articles III 292 para 3 et III- 316 para 1 du Traité constitutionnel servent de référence commune
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