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[Luxembourg 2005 Présidence du Conseil de l'Union européenne]
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Discours
"La politique climatique post-Kyoto à la lumière du processus de Lisbonne": discours prononcé lors du dîner de travail organisé à l'occasion de la réunion à Luxembourg du Conseil Compétitivité, le 17 avril 2005

Date du discours : 17-04-2005

Lieu : Luxembourg

Orateur : Dieter Ewringmann, Finanzwissenschaftliches Forschungsinstitut an der Universität zu Köln

Domaine politique : Compétitivité (marché intérieur, industrie, recherche)

Réunion : Conseil Compétitivité


M. le Président,

M. le Vice-président de la Commission,

MM. les ministres,

Mesdames et Messieurs,

Avant tout, permettez-moi de vous remercier pour l'honneur qui m'est fait de vous présenter quelques réflexions et considérations sur les développements futurs de la compétitivité européenne à la lumière de la politique climatique globale au terme du processus de Kyoto. En raison des contraintes de temps, je simplifierai les choses – sans pour autant vous servir un discours simpliste – du moins je l'espère. Je vais notamment me limiter aux émissions de CO² et n'aborderai pas la réduction des émissions d'autres gaz à effet de serre. De plus, mes projections n'iront pas au-delà de 2020. La raison en est que les 22 et 23 mars derniers, le Conseil européen a décidé de réduire les émissions de CO² de 15% à 30% d'ici 2020. Ainsi, nous, Européens, poursuivons désormais un objectif clairement défini. Enfin, je ne m'étendrai pas sur la nécessité et l'utilité de la protection du climat. Rien sur ses rapports coûts-bénéfice. Pas de modèle climatique. Pas de prévisions de températures planétaires.

Voilà, vous avez ainsi une idée relativement claire de ce dont je vais maintenant parler … Voyons ce qu'il nous reste.

1. Il y a trente ans, la Convention cadre de Rio laissait espérer que les émissions mondiales de gaz à effet de serre pourraient éventuellement être ramenées à un niveau permettant de contenir le réchauffement planétaire dans des limites tolérables. Rio a également débouché sur un vaste consensus politique : il faut non pas que les émissions de CO² augmentent, mais bien les réduire de façon drastique si nous voulons que l'augmentation des températures ne dépasse pas 2ºC par rapport aux températures relevées à l'ère pré-industrielle. Depuis lors, nous avons constaté certains progrès – du moins lorsque nous considérons la création d'institutions ayant pour mission d'aider à la réalisation et à la concrétisation de cet objectif. La ville de Kyoto donne son nom à ce nouveau paradigme : une réduction des émissions de gaz à effet de serre en termes absolus. Bien que limité à une partie de la communauté des Etats, le Protocole de Kyoto a suscité de grands espoirs.

2. En 2012, la première période d'engagement prévue par Kyoto se clôturera plus que probablement sur des résultats désastreux en termes de protection du climat. Nous ne constaterons certainement aucune réduction des émissions globales. Au contraire, nous pensons que les émissions de CO² à l'échelle mondiale seront, en 2012, supérieures d'environ 40 pour cent à celles de l'année de référence 1990. Selon le récent rapport de l'OCDE intitulé "World Energy Outlook", les émissions vont continuer à progresser au-delà de 2012 : en 2020, les émissions mondiales de dioxyde de carbone atteindront les 33 milliards de tonnes. Par rapport aux 20 milliards de tonnes de 1990, il s'agit là non pas d'une réduction mais d'une augmentation de 65 pour cent des émissions !

Certes, l'Union européenne ne sera pas la seule à blâmer pour cette augmentation des émissions. Au cours des dix dernières années, c'est en dehors de l'Europe qu'a été enregistrée la plus forte progression en termes de consommation de combustibles fossiles et d'émissions subséquentes de CO². Et cette tendance va se maintenir : d'ici 2020, les émissions dans le reste du monde auront progressé de 58% (scénario alternatif) à 77% (scénario de référence) par rapport aux niveaux de références de l'année 1990.

3. Mais l'UE ne sera, elle non plus, pas en mesure de réaliser les objectifs qu'elle s'est fixés – même si les mesures politiques prises au sein de l'Union ne sont pas à incriminer. Au lieu de la réduction de 8% prévue, nous pouvons nous attendre à une légère augmentation en valeur absolue des émissions de CO² par rapport à 1990. Le scénario alternatif de l'OCDE en la matière se base sur un taux de croissance plus élevé du PIB réel – 2,4% en moyenne – et sur la prise de mesures additionnelles de politique climatique. Ces calculs montrent une nouvelle progression des émissions de CO² qui se traduira en 2020 par une augmentation de 4 % par rapport à l'année de référence 1990. Dans ce cas de figure, la dynamique de croissance économique que nous souhaitons tous voir s'installer entraîne malheureusement dans son sillage une augmentation des émissions dans l'Union européenne.

4. Malgré l'émergence de ce type de problèmes dès la période 2008-2012 de Kyoto, les chefs de gouvernement des Etats membres de l'UE ont suivi les propositions avancées par leurs ministres de l'Environnement et tenté une première fois d'appréhender la phase post-Kyoto. De l'avis du Conseil européen, il convient d'envisager pour les pays industrialisés une réduction des émissions de l'ordre de 15% à 30% d'ici 2020 par rapport à la ligne de base envisagée dans le Protocole de Kyoto.

Il ne s'agit certes là nullement d'un accord contraignant. L'objectif peut ne pas paraître vraiment nouveau. Toutefois – vu la situation actuelle et à la lumière du processus de Lisbonne – c'est là une perspective remarquable et, me semble-t-il, louable. L'Europe doit montrer le chemin de toute nouvelle avancée en matière de protection climatique. Il est nécessaire que l'Europe prenne des initiatives. Quant à savoir si elles sont suffisantes, c'est là une autre question. Une autre question encore est de savoir s'il y a de bonnes chances pour que cette politique soit mise en œuvre avec succès en Europe.

5. Je vais maintenant reprendre la suggestion européenne pour la phase post-Kyoto et en explorer les implications dans le contexte de la stratégie de Lisbonne. Pour ce faire, supposons que nous nous en tenons au niveau inférieur de la perspective du Conseil. Nous parlons donc d'une réduction de 20% des émissions de dioxyde de carbone en 2020 par rapport au niveau d'émission de 1990. Supposons par ailleurs que seule l'Union européenne procède effectivement à ces réductions.

Diminuer les émissions de 20%, cela signifie que, à partir de 2020, le volume d'émissions sera d'à peine 3 milliards de tonnes de CO² par an – indépendamment de l'échelle et de la vitesse du développement économique. De légers effets structurels sont susceptibles d'être observés en raison de l'utilisation accrue du gaz naturel, lequel contient moins de  carbone par unité d'énergie. Néanmoins, il convient d'envisager que toute croissance économique d'ici à 2020 doit s'accompagner d'une utilisation proportionnellement moindre de combustibles fossiles : au cours des 15 prochaines années, nous devons réduire la consommation d'énergies fossiles de près de 20%.

Il sera plus facile de réduire les émissions en cas de croissance économique relativement faible, comme ce fut le cas ces dix dernières années. En cas de dynamique de croissance plus marquée, nous devrions toutefois mieux prendre la mesure des goulets d'étranglement émergents.

6. Nous avons ici une connexion entre post-Kyoto et Lisbonne. Si l'Union européenne veut devenir “l'économie la plus dynamique et la plus compétitive au monde", capable – entre autres objectifs – de maintenir une cohésion sociale viable à la hauteur des défis démographiques de demain, alors elle doit atteindre des taux de croissance annuels réels de l'ordre de 3% à 4% au moins. Avec une croissance de 4%, l'output potentiel, ou le PIB respectivement, doubleront d'ici 2020. Un taux de croissance réel de 3,5% induirait encore une augmentation cumulative d'environ 70% en 2020. Je baserai mes prochaines explications sur une prévision de croissance de 3,5% – à mon sens, le taux minimum que nous devons nous efforcer d'atteindre.

7. Nous avons donc notre question pour la soirée : Comment assurer l'alimentation énergétique nécessaire à ces “taux de croissance de Lisbonne" si, dans le même temps, l'utilisation de combustibles fossiles doit baisser de 20% pour atteindre les objectifs post-Kyoto ?

En d'autres termes : comment l'UE va-t-elle concilier la couverture d'une demande énergétique en progression de près de 50% – soit quelque 2000 mégatonnes d'équivalents pétrole en 2020 – avec une diminution simultanée de 20% des énergies fossiles ?

8. Actuellement, 20 % de la demande en énergie primaire de l'UE est couverte par des combustibles non fossiles: le charbon, le pétrole et le gaz naturel – les combustibles dits fossiles couvrant les 80% restant-. S'il faut réduire l'utilisation d'énergies fossiles de 20% en termes absolus d'ici 2020, la progression simultanée de la demande énergétique devra alors être couverte par des énergies non fossiles à concurrence de presque 50%. Un accroissement suffisant de la production d'énergie nucléaire d'ici 2020 n'étant pas une option réaliste, le développement des énergies renouvelables serait la seule alternative possible pour satisfaire l'augmentation de la consommation d'énergies non fossiles. Il faudrait donc multiplier la production d'énergies renouvelables par 5 au cours des 15 prochaines années !

9. Dans ce délai de 15 ans, la chose s'avère tout aussi irréaliste que l'option nucléaire. Par conséquent, nous devons envisager un mix énergétique qui sera plus ou moins stable en termes relatifs. Dans son récent rapport "World Energy Outlook 2004", l'OCDE estime que, dans le meilleur des cas, l'énergie nucléaire et les énergies renouvelables pourraient progresser de 25% jusqu'en 2020. La marge de développement de l'énergie nucléaire étant limitée, ce scénario implique de doubler l'utilisation d'énergies renouvelables. 

10. Dans ces conditions, la demande énergétique de l'Europe en 2020 devra être satisfaite avec au maximum 1.070 mégatonnes d'équivalents pétrole de combustibles fossiles si l'on veut atteindre l'objectif post-Kyoto de protection du climat. 375 mégatonnes supplémentaires pourront être produites à partir de sources non fossiles. En conséquence, il y aura un décalage de – en fonction du scénario retenu – 375 à 500 mégatonnes. Cet énorme fossé ne pourra être comblé que par une amélioration massive de l'efficacité énergétique.

11. Poursuivons notre expérience et supposons que le scénario alternatif le plus prudent de l'OCDE prévaudra. Au-delà d'un accroissement de l'efficacité et d'une diminution de l'intensité énergétique, déjà intégrés dans ce scénario, une quantité supplémentaire de 375 mégatonnes devrait être compensée par de nouveaux progrès en matière d'efficacité énergétique. En 2020, l'Union européenne devra pouvoir réaliser un PIB équivalent à deux fois celui d'aujourd'hui pour un imput énergétique de 20% inférieur ! Cela dépasse de loin toutes les hypothèses et résultats actuels en matière de développement de l'intensité énergétique. Et ce serait à n'en pas douter un défi majeur pour l'UE. Rappelons que la faible croissance de ces 15 dernières années s'est accompagnée d'une augmentation assez importante de la consommation énergétique.

12. Donc, l'Union européenne doit renforcer son efficacité de façon à dissocier la croissance économique des imputs énergétiques et des émissions de CO². Ainsi seulement, me semble-t-il, pourrons-nous parvenir à une certaine harmonie entre le processus post-Kyoto et la stratégie de Lisbonne. Cette perspective ne semble pas inaccessible car, au cours des dernières 15 années, nous n'avons pas fait grand-chose pour améliorer l'efficacité énergétique et réduire l'intensité énergétique. Depuis 1990, la baisse de l'intensité énergétique n'a été que de 30%. La marge de manoeuvre reste énorme.

13. L'efficacité doit devenir le mot-clé de la période post-Kyoto, pour d'autres raisons également : toutes les stratégies et mesures nécessaires que l'UE met en œuvre pour remplir ces objectifs climatiques doivent aussi satisfaire le principe de rentabilité. L'efficacité sera la force motrice du processus de Lisbonne. L'efficacité doit aussi jouer un rôle plus important dans la protection du climat. Sinon, l'agenda de Lisbonne sera confronté à des coûts, qui pourraient être évitables. L'inefficacité se traduit toujours par des coûts trop élevés.

14. Le système de mesures incitatives/sanctions qui caractérise aujourd'hui la politique climatique communautaire n'est pas adapté à l'objectif post-Kyoto d'une réduction de 80% des émissions de CO² par rapport aux niveaux de 1990. Ces instruments ne sont pas suffisamment efficaces et génèrent des coûts trop élevés. C'est également vrai pour le mécanisme communautaire d'échange de droits d'émissions de CO². Dans le contexte actuel, ce système d'échange de droits peut fonctionner comme un instrument rentable pour atteindre le plafond européen d'émissions cumulatives. Il offre également une  excellente base instrumentale pour la poursuite d'objectifs post-Kyoto plus ambitieux. Le mécanisme d'échange de droits d'émission permet de traduire ces objectifs directement en prix de rareté réels pour le CO², induisant par là une adaptation orientée marché et efficace des options les plus compétitives de réduction des émissions. C'est là l'impact positif d'un mécanisme de marché qui bénéficie d'un "soutien institutionnel" – un mécanisme de marché qui "cadre" avec le processus de Lisbonne, car il ouvre la voie à un le regroupement des politiques économique et environnementale.

Toutefois, jusqu'à présent seul le secteur énergétique et une partie de l'industrie étaient concernés par le système "cap and trade" (plafond et échanges) du mécanisme européen d'échange de droits d'émissions. Les potentiels de réductions dans d'autres domaines, qui peuvent bien souvent être utilisés à des coûts nettement moindres, ne sont pas soumis à des règles aussi strictes – quand ils ne sont pas soumis à aucune restriction. En conséquence, nous n'avons pas de prix unitaire pour l'émission d'une tonne de CO², prix qui pourrait servir d'instrument de mesure de l'efficacité. Pour cette raison, les gains d'efficacité dans les secteurs qui participent au système d'échange de quotas d'émissions sont annulés par l'inefficacité des autres secteurs. Le tout allant de pair avec une sous-exploitation des potentiels de croissance dans la sphère économique.

15. Les principaux potentiels d'accroissement de l'efficacité énergétique et de réduction efficace des émissions de CO² se situent au niveau des ménages, des bâtiments et du secteur des transports. Ici, les "low hanging fruits" (mesures faciles à appliquer) sont nombreux, et leur mise en oeuvre aisée et peu onéreuse. Si l'on considère notamment les déplacements automobiles, le chauffage et la consommation énergétique des bâtiments résidentiels, il suffit bien souvent d'une simple adaptation de nos habitudes ou d'un investissement minimal assorti de temps d'amortissement extrêmement courts. Voilà les secteurs qui représentent une part sans cesse croissante des émissions de CO². Néanmoins, ils ne sont soumis à aucune restriction quantitative, il est donc impossible de disposer d'informations suffisantes à ce sujet et de cibler ces marchés.

16. Indépendamment de l'envergure spécifique d'un objectif post-Kyoto contraignant de réduction des émissions, le système de plafond devrait être adapté et étendu à ces secteurs afin de garantir les gains d'efficacité et de réduire les coûts macroéconomiques. Ce faisant, néanmoins, il conviendrait de supprimer le mécanisme de droits acquis actuellement en place, qui bloque tout nouveau progrès en matière d'efficacité et induit des coûts de transaction extrêmement élevés. Qui plus est, l'orientation efficacité et innovation du processus de  Lisbonne, qui favorise nettement la dérégulation, n'autorise certainement plus les mécanismes administratifs byzantins tels que celui des droits acquis. Au contraire, la phase post-Kyoto devrait favoriser l'exploitation des avantages "efficacité" du système d'échanges de droits d'émissions en faveur du processus de Lisbonne via un recours accru à la mise aux enchères et une baisse des coûts de transaction.

17. En étroite relation avec cet agenda, il importe de reconsidérer l'octroi de subsides publics au secteur de l'énergie. Plus qu'aujourd'hui, ces subsides doivent être soumis à des critères tels que l'efficacité énergétique et l'efficacité CO². A tout le moins, l'argent public devrait être affecté de façon à assurer une contribution maximale à la protection du climat en Europe. Dépenser à tout-va – ce que nous appelons en Allemagne le "principe de l'arrosoir" – n'aidera pas à remplir les missions post-Kyoto.

18. Lorsqu'on parle de l'efficacité de la protection du climat lors de la phase post-Kyoto, il ne faut pas ignorer les mécanismes flexibles établis à Kyoto. Eviter une tonne d'émissions de CO² est certes nettement moins onéreux dans un pays en développement qu'en Europe. Dans la perspective d'une efficacité statique, nous devrions appliquer autant que possible les mécanismes flexibles. Cependant, sur le plan de l'efficacité dynamique, une plus grande prudence s'impose – y compris dans l'intérêt de l'Europe. Les mécanismes flexibles impliquent habituellement l'application de solutions techniques standard dans des endroits où elles ne l'étaient pas auparavant. Etant donné que les objectifs post-Kyoto appellent de fortes dynamiques d'innovation, ce type de politique peut facilement s'avérer contre-productif. Donc, la question de savoir comment utiliser à l'avenir les mécanismes de développement propre ne peut être débattue sans tenir compte du rôle futur de l'UE dans le processus post-Kyoto.

19. Quel sera donc le rôle de l'UE ? Naturellement, je ne peux qu'esquisser une ébauche grossière des conditions et du contexte : au cours des 15 prochaines années, deux tiers de la demande supplémentaire en énergie dans le monde proviendra des pays en développement. 85% des approvisionnements supplémentaires en énergie requis seront couverts par les combustibles fossiles. Selon le scénario de référence de l'OCDE, les émissions actuelles de CO² vont augmenter de 40% d'ici 2020 et de 60% d'ici 2030. En 2020, l'Union européenne représentera à l'échelle mondiale 15% seulement de la consommation énergétique et 13% des émissions.

20. Ces quelques chiffres montrent clairement que le rôle future de l'Europe dans la politique climatique ne saurait se limiter à "faire une Europe propre". Alors que l'Europe s'efforce de réduire ses émissions de 20% d'ici 2020 – ce qui correspond à 800 millions de tonnes de CO² –, la Chine verra ses émissions augmenter de 1,6 milliards de tonnes, augmentation qui sera de 4 milliards de tonnes pour l'ensemble des pays en développement. En fonction du scénario retenu, l'accroissement des émissions de CO² suffira à elle seule à annuler la réduction des émissions européennes.

21. Tant qu'il ne s'agira que d'une initiative isolée, les mesures ambitieuses prises par l'Europe pour réduire ses propres émissions de CO² ne seront qu'une goutte d'eau dans l'océan. Dès lors, l'Europe ne peut se limiter à réaliser ses propres objectifs climatiques. Elle doit également agir comme précurseur d'une politique internationale, tant sur le plan politique que technique.

  • La première tâche politique consiste à intégrer l'ensemble des pays industrialisés et des pays en développement dans le plafond quantitatif du système d'échange de droits d'émission. Sinon la phase post-Kyoto n'aura aucun impact significatif sur la protection du climat. L'UE a les moyens de donner ici des impulsions nouvelles et décisives, lesquelles permettront, dans le même temps, de redynamiser le processus de Lisbonne.

  • Sur les plans économique et technique, l'Europe devrait assumer son rôle en développant les technologies nécessaires pour dissocier la croissance mondiale et les émissions de gaz à effets de serre. Telle est la voie dans laquelle l'Europe doit s'engager. De la sorte, l'Europe contribuera non seulement à assurer la protection du climat et sa propre efficacité énergétique, mais elle permettra également une répartition équitable du gigantesque marché mondial que représentera la modernisation de la fourniture d'énergie. En outre, certains grands pays en développement montrent un intérêt réel pour des solutions énergétiques efficaces et pour les sources de combustibles non fossiles, bien qu'ils ne soient soumis à aucun plafond contraignant d'émissions. Le développement économique impressionnant en Chine, en Inde et dans d'autres pays semble avoir provoqué une attention nouvelle et conduit à des réflexions sur le principe de précaution et le concept de "qualité-finance". D'autres pays envisagent de réorganiser l'ensemble de leur production d'énergie. D'où, pour l'Europe, l'opportunité de nouvelles parts de marché. Et, en outre, de meilleures de chances de partenariat énergétique global. En ce sens, les vastes négociations, finalement menées avec succès, entre l'Europe et la Russie préalablement à la ratification du Protocole de Kyoto par la Russie nous ont positivement surpris.

Résumons-nous : la phase post-Kyoto est un défi de taille pour la politique européenne. Toutefois, elle ouvre également de nombreuses opportunités en termes de soutien au processus de Lisbonne.

  • Le défi pour l'Europe sera de mobiliser des dynamiques d'innovations, d'exploiter toutes les réserves d'efficacité et d'obtenir de justes prix en utilisant les mécanismes de marché. L'Europe dispose encore d'une large marge de manoeuvre pour de nouvelles réductions des émissions de CO² et l'accroissement de la productivité énergétique, réalisable à faibles coûts. Si l'Europe préconise le développement des énergies renouvelables selon le strict critère du rapport coût-efficacité, et si l'efficacité de l'utilisation de l'énergie est renforcée dans le même temps, alors les efforts en matière de protection du climat viendront également appuyer le processus de Lisbonne.

  • Cela suppose que les mécanismes incitatifs tels que ceux du marché puissent fonctionner au travers de coûts et de prix réels basés sur les potentiels techniques européens et sur la volonté de payer. Ces mécanismes doivent être protégés des subsides, lesquels entravent la concurrence. Cette stratégie implique également que les problématiques environnementales qui ne peuvent faire l'objet d'un mécanisme d'échange soient traitées avec d'autres techniques d'internalisation, telles que celles en vigueur sur les marchés. 

  • Sans cette initiative "efficacité" à l'adresse du marché intérieur et du reste du monde, le processus post-Kyoto ne sera pas d'un grand secours pour la  protection du climat. Sans cette initiative "efficacité", le processus de Lisbonne échouera lui aussi. Le succès de Lisbonne dépend fortement de la suppression des vieilles structures économique et énergétiques avec l'aide de mesures incitatives conformes au marché et susceptibles d'enclencher les dynamiques d'innovation et d'efficacité.

Merci pour votre attention.


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Dernière mise à jour de cette page le : 20-04-2005

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