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[Luxembourg 2005 Présidence du Conseil de l'Union européenne]
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Discours
Discours prononcé par Jean-Claude Juncker au 3e Sommet du Conseil de l’Europe, Varsovie, les 16 et 17 mai 2005

Date du discours : 16-05-2005

Lieu : Varsovie

Orateur : Jean-Claude Juncker

Domaine politique : Affaires générales et Relations extérieures

Réunion : Participation de la Présidence au 3e Sommet du Conseil de l'Europe


Mesdames, Messieurs,

Il y a presque 70 ans, le comte Richard Coudenhove-Kalergi déplorait qu’"il existe un pays grand et merveilleux, mais qui s’ignore. Ce pays s’appelle Europe." Quel chemin notre continent n’a-t-il accompli depuis pour arriver à ce jour ; cette Europe, qui a vécu pendant des siècles au rythme des conflits armés, qui, si elle a donné naissance aux plus belles œuvres de l’humanité, a aussi commises sur son sol les pires atrocités.

Quel symbole constitue dès lors cette rencontre à Varsovie, ville qui a vu naître Frédéric Chopin et Marie Curie, mais aussi ville martyre, occupée. Mais jamais Varsovie ne s’est laissée abattre. Aucun occupant n’a réussi à éteindre le désir de liberté de cette ville, toujours et encore reconstruite. Aujourd’hui, ce 3e Sommet du Conseil de l’Europe se réunit dans une Pologne libre, une Pologne fière, une Pologne qui occupe enfin la place à la table européenne qui est la sienne.

Lorsque le Conseil de l’Europe fut fondé et pendant des décennies encore, on n’aurait osé imaginer qu’un jour un Sommet comme celui-ci puisse se dérouler dans la capitale polonaise. Mais l’Europe a tenu la promesse de Winston Churchill, qui disait (en 1948 au Congrès européen de La Haye) : "Notre objectif n’est pas confiné à l’Europe de l’ouest. (…) Nous devons viser rien de moins que l’union de l’Europe toute entière, et d’avance nous nous réjouissons avec confiance du jour où elle sera accomplie."

Là où au début il n’y avait que dix Etats, ils sont aujourd’hui 46 à se reconnaître dans les valeurs communes défendues par le Conseil de l’Europe. En tant que représentant de l’Union européenne, qui réunit 25 Etats européens, je rends hommage à l’action du Conseil de l’Europe depuis 56 ans en faveur de la construction d’une Europe démocratique, stable et prospère.

Le Conseil de l’Europe fut la première institution démocratique commune de notre continent. C’est avec sa création que l’histoire de l’Europe a pris son envol. Les principes qui dirigeaient son action dès le premier jour ont résisté à toutes les modes et restent valables aujourd’hui comme ils l’étaient le 5 mai 1949 : la défense des droits de l’homme et des libertés fondamentales, la promotion de la démocratie pluraliste ainsi que la prééminence du droit.

Le Conseil de l’Europe a donné naissance à ce qui est sans doute la plus noble des institutions communes dont s’est dotée l’Europe, la Cour européenne des droits de l’Homme. La reconnaissance que les hommes et les femmes ont des droits inaliénables est à la base même de l’idée européenne. Leur respect, auquel veille avec grande sagesse la Cour de Strasbourg, est une condition sine qua non pour faire partie de la famille européenne.

Par conséquent, il est aussi de la responsabilité des Etats membres d’assurer aux mécanismes qui garantissent le respect des droits de l’Homme un fonctionnement efficace. C’est vrai tout particulièrement pour la Cour européenne. Aujourd’hui, 78 000 cas sont en instance à Strasbourg. La Cour est au bord de l’asphyxie. Rester les bras croisés devant l’énormité des retards que les procédures sont en train d’accumuler serait inexcusable. L’Union européenne souligne l’importance dans ce contexte de la ratification et de la mise en œuvre rapide du Protocole 14. C’est une étape primordiale.

L’Union européenne soutient les efforts de renforcer les ressources des autres organes du Conseil de l’Europe. Leurs activités de monitoring de l’ensemble des Etats membres constituent une garantie essentielle pour nos citoyens.

Le Conseil de l’Europe garde toute son actualité. On l’a vu après 1989, quand il est devenu le lieu de réunion naturel de toutes les nations européennes si longtemps séparées par un rideau de fer. Et si aujourd’hui on peut être membre du Conseil de l’Europe sans être membre de l’Union européenne, il est tout à fait inconcevable qu’un Etat qui mettrait en doute les valeurs défendues par le Conseil de l’Europe puisse adhérer à l’Union européenne. Les critères de Copenhague sont là pour le confirmer. L’adhésion de l’Union européenne à la Convention européenne de la sauvegarde des droits fondamentaux et des libertés fondamentales, que rendra possible la Constitution pour l’Europe, est ainsi un enjeu fondamental, et je voudrais que sur le plan technique les travaux préparatoires soient entamés.

L’expertise indéniable du Conseil de l’Europe est particulièrement précieuse alors que notre continent doit faire face aux menaces du terrorisme international. L’Union européenne salue l’action du Conseil de l’Europe dans ce domaine et notamment la dernière Convention pour la prévention du terrorisme ainsi que les lignes directrices sur le respect des valeurs et droits fondamentaux dans la lutte contre le terrorisme adoptées en 2002.

Winston Churchill disait déjà en 1948 que "nous n’avons pas besoin de perdre notre temps dans des disputes sur qui était à l’origine de l’idée d’une Europe unie." Tant le Conseil de l’Europe que l’Union européenne nourrissent leurs racines dans le même rejet de la guerre, dans le même optimisme des pionniers européens qu’étaient le comte Coudenhove-Kalergi, Aristide Briand ou encore Gustav Stresemann. Tant le Conseil que l’Union ont fait leur le constat de Coudenhove-Kalergi (1923) : "Une Europe divisée conduit à la guerre, à l'oppression, à la misère ; une Europe unie à la paix, à la prospérité."

Quand il s’agit de l’essentiel, les rivalités entre le Conseil de l’Europe et l’Union européenne n’ont pas lieu d’être. La sauvegarde des droits de l’Homme, l’action culturelle ainsi que son action normative font du Conseil de l’Europe une organisation dont l’Union européenne serait dans l’impossibilité de prendre le relais.

Le Conseil de l’Europe et l’Union européenne sont d’une grande complémentarité de par leurs domaines d’action et leur expériences.

Il est donc de notre devoir d’œuvrer ensemble pour plus de cohésion et d’unité en Europe dans le cadre d’un partenariat entre nos deux organisations. Pour que ce partenariat puisse s’épanouir, il revient aux uns de respecter les prérogatives et domaines d’excellence des autres. La transformation de l’Observatoire des phénomènes racistes et xénophobes de Vienne en Agence des droits de l’Homme devra respecter cet esprit. Des modèles de coopération enrichissants pour les deux côtés existent et fonctionnement dans la pratique. Qu’ils nous guident aussi dans d’autres domaines dans lesquels des progrès restent à accomplir. J’appelle donc de mes vœux l’adoption d’un mémorandum ambitieux sur le développement des relations entre l’Union européenne et le Conseil de l’Europe sur la base des lignes directrices déjà élaborées.

Notre continent continue d’avoir besoin du Conseil de l’Europe. La réunification de l’Europe n’est pas la fin de son action, ce n’est au contraire que le début de sa mission véritable. La déclaration de Varsovie et le plan d’action que ce Sommet prévoit d’adopter tracent le cadre et fixent la direction de l’action future.

En les mettant en œuvre, le Conseil de l’Europe consolidera son rôle et sa vocation : celle de creuset et de mémoire de l’Europe ; celle de gardien de la démocratie, de l’Etat de droit et des droits de l’Homme. La tâche est ambitieuse mais elle est réalisable.

Le Conseil de l’Europe est irremplaçable en tant que forum de dialogue à l’échelle européenne, en tant que haute école du respect des droits de la personne humaine, et en tant que forge des normes de droit et des bonnes pratiques.

Je souhaite que le Conseil de l’Europe reste ce qu’il fut tout au long des décennies depuis 1949 : une organisation qui se caractérise par un haut niveau d’exigences.


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Dernière mise à jour de cette page le : 17-05-2005

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