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[Luxembourg 2005 Présidence du Conseil de l'Union européenne]
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Discours
Déclaration de Luc Frieden, Ministre luxembourgeois de la Justice au nom de l'Union européenne lors du 11e Congrès des Nations Unies pour la prévention du crime et la justice pénale, 18-25 avril 2005

Date du discours : 23-04-2005

Lieu : Bangkok, Thailand

Orateur : Luc Frieden

Domaine politique : Justice et Affaires intérieures


Monsieur le président,

En tant que ministre de la Justice du Luxembourg et président du Conseil des ministres "Justice et Affaires intérieures" de l’UE, j’ai l’honneur de m’exprimer au nom de l’Union européenne. Les pays candidats – la Bulgarie et la Roumanie, qui signeront le traité d’adhésion à l’UE la semaine prochaine à Luxembourg, la Croatie et la Turquie – ainsi que les pays du processus d’association et de stabilisation et les candidats potentiels – l’Albanie, la Bosnie-Herzégovine, l’ancienne République yougoslave de Macédoine, la Serbie et le Monténégro, de même que l’Islande et la Norvège, membres de l’Espace économique européen, s’associent à cette déclaration.

Monsieur le président, permettez-moi tout d’abord de remercier le gouvernement thaïlandais de son excellent et chaleureux accueil. Je souhaite également adresser des remerciements particuliers aux agences des Nations Unies pour leur contribution à la préparation de ce congrès.

Selon mes informations, les discussions ont été intéressantes et constructives tant lors des séances plénières que des différents ateliers.

Ces derniers jours du congrès, sous forme de "segment ministériel", devraient nous permettre d’entériner les résultats obtenus pendant les discussions et de les exprimer dans une déclaration, que nous adopterons lundi. Ils nous donnent aussi l’occasion de réaffirmer à l’intention de l’opinion publique notre détermination à combattre de nombreuses formes de criminalité.

Depuis le dernier congrès qui s’est tenu à Vienne en 2000, le monde a été confronté à des menaces criminelles très graves auxquelles nous devons tous répondre.

Le traité de l’Union européenne se référe à des mesures de prévention de la criminalité et de lutte contre ses différentes manifestations, notamment le terrorisme et la corruption, comme objectifs qui conduisent à la création et à la préservation d’un espace européen de liberté, de sécurité et de justice.

L’Union européenne considère comme particulièrement opportun que les thèmes de discussion de ce congrès incluent la coopération internationale contre la criminalité transnationale organisée et la corruption internationale.

Permettez-moi de mentionner la résolution 1373 de septembre 2001, dans laquelle le Conseil de sécurité relève les liens étroits de la criminalité internationale et transnationale organisée, des drogues illégales, du blanchiment d’argent, du trafic d’armes et des mouvements illégaux de substances nucléaires, chimiques et biologiques avec le terrorisme international.

Nous devons combattre ces fléaux par une intensification de la coopération internationale, dans le respect du droit, de la démocratie et des droits de l’homme. Cette coopération doit être édifiée à l’échelon bilatéral, régional et international.

L’Union européenne encourage le respect des normes internationales reconnues, notamment dans la lutte contre la criminalité organisée, la cybercriminalité, la corruption, le blanchiment d’argent et le financement du terrorisme dans des pays tiers.

L’UE reconnaît à cet égard l’importance des instances de l’ONU et soutient le développement d’approches multilatérales dans la lutte contre la criminalité organisée, les efforts de ratification et d’application complètes des instruments internationaux, tels que les conventions des Nations Unies contre la criminalité et la corruption internationales, et le développement de normes et dispositions internationales élaborées dans d’autres instances telles que le Conseil de l’Europe, le G8, le GAFI, l’OSCE et l’OCDE.

Sur le plan de la coopération pratique, la Commission européenne et l’UNODC ont signé un échange de lettres formel en janvier de cette année afin de renforcer leur coordination, leur coopération et leur partenariat, ce qui traduit la détermination des deux parties à renforcer leurs efforts communs pour combattre le crime organisé et les drogues illégales.

Au niveau régional européen, le développement progressif des pouvoirs de l’Union européenne dans le domaine de la justice et des affaires intérieures accroît la qualité et le nombre d’instruments à notre disposition. L’Union a compris qu’elle doit aller de l’avant dans le domaine de la coopération. Elle a, par exemple, adopté un mandat d’arrêt européen qui remplace la procédure traditionnelle d’extradition entre les États membres de l’Union par une procédure de remise de la personne recherchée. Aujourd’hui, la remise d’un individu prend en moyenne 45 jours entre États membres, au lieu de neuf mois dans l’ancien système d’extradition.

Le mandat d’arrêt concrétise dans les faits le principe de reconnaissance mutuelle des jugements entre États membres de l’Union.

La décision-cadre relative au mandat d'arrêt européen et aux procédures de remise entre États membres est emblématique à plusieurs égards. Tout d’abord, elle confirme l’évolution vers une coopération purement judiciaire dans le domaine pénal, qui avait débuté avec la convention d’application de l’accord de Schengen. Désormais, les mandats d’arrêt européens sont émis et exécutés exclusivement par les autorités judiciaires.

Deuxièmement, la condition de double incrimination a été supprimée lorsque les faits motivant l’émission d’un mandat d’arrêt européen concernent, dans le droit de l’État où est émis le mandat, 32 infractions graves (dont le terrorisme, le trafic illicite de narcotiques, la corruption, le blanchiment d’argent provenant d’activités criminelles, le racisme et la xénophobie) énumérées dans la décision-cadre.

Les compromis obtenus au cours de la négociation de la décision-cadre établissant le mandat d’arrêt européen ont facilité la mise en application du programme de reconnaissance mutuelle. Le Conseil a adopté, ou est en train d’adopter, d’autres décisions-cadre donnant une expression concrète au principe de reconnaissance mutuelle pour les décisions concernant le gel d’actifs, l’imposition de sanctions financières et les confiscations et prépare la création d’un mandat d’obtention de preuves, dont la portée sera semblable au mandat d’arrêt européen.

La mise en application du mandat d’arrêt, de même que l’ensemble du programme de reconnaissance mutuelle, exige, comme l’a souligné la Cour de Justice de l’Union européenne, que

« les États membres aient mutuellement confiance dans leurs systèmes de justice pénale et que chacun d’eux reconnaisse le droit pénal en vigueur dans les autres États membres, même dans les cas où les résultats seraient différents si leur propre droit national était appliqué. »

La Présidence luxembourgeoise estime que l’accomplissement de nouveaux progrès dans la mise en application du principe de reconnaissance mutuelle exigera une certaine souplesse des règles de fond et de procédure, ainsi qu’une évaluation constante de la qualité de la justice, y compris le système pénitentiaire, dans les différents États membres, ce qui renforcera la confiance des citoyens dans le système judiciaire des autres États membres de l’Union.

Le degré de confiance élevé qui prévaut déjà, et qui constitue le socle du système de reconnaissance mutuelle, est la raison pour laquelle les États membres de l’UE sont parvenus à pousser la coopération entre eux plus loin qu’avec des pays non membres de l’UE et ont mis au point différents instruments de coopération, comme la décision-cadre déjà citée sur le mandat d’arrêt européen, qui ne sont pas ouverts aux pays tiers.

Concernant les autres progrès réalisés dans l’Union européenne, j’aimerais attirer votre attention sur la mise en place d’Eurojust en 2002. Cette unité, dont le budget s’élève cette année à 13 millions d’euros, se compose de procureurs, de magistrats ou d’officiers de police de compétences équivalentes détachés par chaque État membre en fonction de son système judiciaire. Elle est chargée de contribuer à une coordination en bonne et due forme entre les autorités nationales responsables des poursuites et d’apporter son assistance aux enquêtes sur des cas de criminalité organisée. Elle a son siège à La Haye, aux Pays-Bas, et a coordonné 380 affaires graves l’an dernier.

L’Union européenne cherche également à créer des instruments améliorant les droits des victimes et des accusés ainsi que des instruments de prévention des délits. L’Union européenne a ainsi créé le Réseau européen de prévention de la criminalité, qui regroupe des praticiens de tous les États membres spécialisés dans la prévention de la criminalité. L’Union a adopté une décision-cadre relative au statut des victimes dans le cadre des procédures pénales et élabore actuellement une décision-cadre consacrée aux droits de procédure pénale.

L’Union a accentué la lutte contre le terrorisme après les attentats de New York et Madrid. Elle applique actuellement un plan d’action de lutte contre le terrorisme adopté par le Conseil européen en juin 2004. Ce plan contient quelque 200 mesures de renforcement de la lutte contre le terrorisme ; parmi celles-ci, l’Union européenne soutient pleinement celles qui ont été adoptées dans le cadre des Nations Unies.

L’Union européenne réaffirme une nouvelle fois qu’elle est disposée à intensifier sa coopération avec tous les pays dans la lutte contre le terrorisme. Elle a récemment signé des accords d’assistance mutuelle et d’extradition avec certains pays. En outre, dans ses relations avec des pays tiers, elle prendra en compte les efforts que ceux-ci accomplissent dans ce domaine et continuera à les aider non seulement à combattre le terrorisme, mais aussi à prévenir et réparer les situations qui peuvent l’alimenter.

L’internationalisation du terrorisme prouve toutefois que la coopération est également nécessaire au niveau mondial. Nous attachons une grande importance au travail des Nations Unies dans ce domaine. L’Union européenne se félicite que le projet de déclaration de ce congrès appelle les États qui ne l’ont pas encore fait à signer et ratifier les instruments internationaux contre le terrorisme.

L’Union soutient les travaux du Comité contre le terrorisme et continuera à encourager la conclusion des négociations sur le projet de convention générale contre le terrorisme. Elle salue l’adoption de la Convention pour la suppression des actes de terrorisme nucléaire.

Monsieur le président,

La lutte contre la corruption est l’un des autres thèmes majeurs de ce congrès. La corruption représente une menace pour le développement économique, la démocratie et la coopération internationale. Dans sa résolution 54/128 du 17 décembre 1999, l’assemblée générale des Nations Unies a estimé que la corruption est un instrument privilégié de la criminalité organisée et de ses tentatives de subversion des gouvernements et du commerce légitime.

L’Union européenne a joué un rôle très actif dans la négociation de la convention des Nations Unies contre la corruption. L’Union s’est montrée très attentive aux requêtes de nombreux pays et a favorisé le consensus qui s’est formé pendant la négociation sur la question de la récupération des actifs.

Je peux vous informer, Monsieur le président, qu’une grande majorité des pays membres de l’Union européenne ont déjà signé la convention ou ont engagé sa ratification. Je tiens également à souligner que l’Union européenne s’est déjà engagée à participer activement à la conférence des États parties, lorsqu’elle se réunira, et à travailler à l’application de la convention en collaboration avec les Nations Unies.

La mise en œuvre des différentes conventions internationales que j’ai mentionnées est indispensable. Dans tous les domaines évoqués, l’UE estime que nous devrions maintenant consacrer tous nos efforts à l’application des conventions existantes avant d’en créer de nouvelles.

Monsieur le président,

L’un des séminaires organisés lors du congrès est très justement consacré aux mesures de lutte contre la fraude informatique. Au niveau européen, l’Union a adopté différentes décisions relatives à la criminalité via Internet et soutenu les négociations qui ont conduit à la convention sur la cybercriminalité, adoptée par le Conseil de l’Europe en 2001. Cependant, les nouvelles technologies de communication posent de nouveaux défis aux systèmes de justice pénale. Les frontières deviennent de plus en plus insignifiantes et, concurremment, les mesures nationales de moins en moins efficaces. L’Union européenne considère que la convention du Conseil de l’Europe est un instrument approprié et qu’il serait utile que d’autres États l’adoptent.

Le programme de prévention de la criminalité et de justice pénale de l’ONU doit optimiser l’utilisation de ses ressources limitées. Il ne doit pas, à notre avis, accomplir des tâches qui sont prises en charge avec succès dans d’autres parties du système onusien.

Les États membres de l’Union reconnaissent que leur coopération efficace et fructueuse dans le domaine de la justice pénale aurait été impossible, ou n’aurait pas pu se développer à un tel degré, si la priorité n’avait pas été donnée à la qualité de la justice dans l’UE. Tout en s’assurant du respect de normes exigeantes dans les systèmes judiciaires de ses membres, l’UE a adopté des principes et conditions qui cherchent à garantir la qualité de la justice également dans les systèmes judiciaires des pays candidats à l’UE.

Permettez-moi enfin, Monsieur le président, de vous rappeler l’importance que l’Union européenne attache à la lutte contre la criminalité économique et financière et le blanchiment d’argent. La lutte contre ces formes de criminalité nous permettra également de progresser dans la lutte contre le financement du terrorisme. Nous devons continuer à promouvoir la ratification et l’application des instruments internationaux dans ce domaine, ainsi que des 40 recommandations et 9 recommandations spéciales contre le financement du terrorisme publiées par le Groupement d’action financière sur le blanchiment des capitaux, dans leur révision d’octobre 2003.

En tant que responsables politiques, notre mission est de bâtir un monde où les peuples peuvent vivre dans la liberté politique et économique et la prospérité. Le terrorisme, la corruption et la criminalité organisée sont les ennemis de ces objectifs. Nous ne permettrons pas au terrorisme, à la corruption et à la criminalité d’interférer avec notre projet politique de société libre et prospère basée sur la primauté du droit.

Je vous remercie.




Dernière mise à jour de cette page le : 26-04-2005

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